
Les Dictateurs
Il est resté une odeur dans les plantations :
un amalgame de sang et de corps, un pétale nauséabond et pénétrant.
Parmi les cocotiers les tombes sont remplies
de squelettes brisés, de râles silencieux.
Le délicat satrape
converse avec des coupes, des cols, des cordons dorés.
Le petit palais luit comme une horloge
et les rires véloces et gantés
traversant parfois les couloirs
viennent rejoindre les voix mortes
et les bouches bleues fraîches enterrées.
Les pleurs sont là cachés comme une plante
qui s’égrène inlassable sur le sol
et dans la nuit éploie ses grands thyrses aveugles.
La haine s’est formée écaille par écaille
et coup à coup, dans l’eau terrible du marais,
avec un mufle plein de vase et de silence.
Pablo Neruda,
recueilli dans Chant général,
traduction de Claude Couffon
© Éditions Gallimard, 1977
Et capté ici
Mon anthologie personnelle (Logo cliquable)
Très beau poème de Pablo Neruda. J’aime beaucoup l’auteur du Canto general, c’est une grande voix épique comme il y en a peu. Merci pour cette citation.
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Il fait froid dans le dos ce poème ; je ne reconnais pas le Pablo Neruda que je connais, mais j’aime !
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Merci Martine pour ce poème saisissant. C’est drôle, je l’ai relu plusieurs fois, et à chaque fois, pour véloce, j’ai lu féroce…
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Féroce… n’est-ce pas ce qu’induit ce poème ?
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Oui, justement. 🙂
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